Nathalie Beauvir-Rodes est responsable de la recherche et de l’analyse des obligations durable d’Ostrum AM, un affilié de Natixis Investment Managers. Ce poste, qu’elle occupe depuis 2020, s’inscrit dans la continuité d’une carrière construite autour des obligations durables, qui constituent à la fois un moteur et un fil rouge professionnel pour Nathalie.
Quand avez-vous commencé à travailler dans l’investissement durable ?
J’ai commencé ma carrière en 2000 en banque d’investissement à la Société Générale, chez SGCIB. J’ai débuté comme Sales sur les dérivés actions. Je me suis ensuite spécialisée dans le crédit en occupant différents postes tels qu’analyste crédit, structureur de CDO [Collateralized Debt Obligation] et gérante de portefeuille à des fins d’optimisation du capital réglementaire de la banque.
La crise des subprimes en 2007 a été une sorte de déclencheur pour moi. Elle m’a amenée à m’interroger sur le sens de la finance. C’est à cette période que j’ai commencé à m’intéresser au développement de la finance durable.
La perspective d’allier performance financière et extra-financière m’a énormément séduite. Dès 2012, j’ai décidé de réaliser une thèse professionnelle à l’ESSEC [une grande école de commerce française], dans le cadre d’un executive master sur « l’impact réel des fonds ISR sur le développement durable des
entreprises ». Cette thèse a pris la forme d’une étude de marché et a été une formidable opportunité pour moi de rencontrer des professionnels engagés et de prendre avec enthousiasme le virage de la finance durable.
Suite à cette étude, j’ai rejoint Kepler Cheuvreux en 2014 pour y développer une offre de recherche crédit ESG, avec un accent mis sur le marché naissant des green bonds. J’ai ensuite étendu cette expertise aux social bonds et aux sustainability bonds au sein de La Banque Postale AM (LBP AM) en 2019, où j’étais responsable de l’analyse et de la recherche sur les obligations durables.
Pour les non-initiés, les green bonds sont des obligations qui recherchent un bénéfice environnemental, les social bonds poursuivent un bénéfice social tandis que les sustainability bonds recherchent un bénéfice à la fois environnemental et social. En 2020, j’ai rejoint Ostrum AM en tant que Leader Expert sur cette classe d’actifs.
En quoi la durabilité continue-t-elle à vous motiver ?
La finance joue un rôle essentiel dans le développement durable de l’économie. Et j’aime l’action et avoir de l’impact. Pour reprendre à mon compte une citation de Yann Arthus Bertrand, je suis convaincue qu’ «agir rend heureux » !
En développant une méthodologie d’analyse rigoureuse des obligations durables, en dialoguant régulièrement avec les parties prenantes de ce marché, j’ai l’impression de contribuer par mon action à un développement exigeant de l’écosystème des obligations durables. Être intransigeant dans notre sélection contribue à limiter les risques d’écoblanchiment et à maximiser l’impact pour nos clients et, in fine, pour notre société et notre planète.
C’est exigeant et très motivant également. La finance durable est un secteur au développement rapide et en pleine mutation. Apprendre de nouvelles choses tous les jours dans tous les domaines (technologie, instruments, réglementations, standard de place, enjeux etc.) est très simulant intellectuellement.
Enfin, j’aime relever des défis - et il y en a beaucoup dans ce marché en plein essor. Pour n’en citer que quelques-uns : les demandes de plus en plus pointues de nos clients en matière de RSE, l’enjeu des données (disponibilités, fiabilité, standardisation, déploiement dans les systèmes informatiques etc). Il y a également l’enjeu de l’alignement sur les nouvelles réglementations, notamment en termes de disclosure – et non des moindres comme l’application de la SFDR en amont de la CSRD, définition floue de ce qu’est un investissement durable.
C’est pourquoi collaborer avec beaucoup d’équipes différentes au sein d’Ostrum AM est très enrichissant. Cela permet d’avoir une vision pluridimensionnelle des sujets et des enjeux.
Qu’est-ce qui différencie Ostrum AM des autres sociétés d’investissement durable ?
Ce n’est pas très connu hors de France, mais Ostrum AM gère près de 400 Mds d’encours. C’est l’un des leaders européens de la gestion institutionnelle et un acteur engagé dans le développement durable. Nous avons été l’une des premières sociétés de gestion française à signer les PRI en 2008 et nous demeurons depuis attachés à promouvoir des pratiques d’investissement responsables de haut niveau.
La majorité de nos clients sont des assureurs qui, selon nous, comptent parmi les plus avancés et les plus engagés sur les sujets ESG et climatiques. Nous gérons pour eux des portefeuilles avec des objectifs tels que la réduction de l’intensité carbone du portefeuille ou son alignement sur un scénario de température 2°. Nous avons également déployé des politiques sectorielles strictes et reconnues par le marché sur des énergies fossiles telles que le charbon thermique et le pétrole et gaz non conventionnel.
Avec plus de 30 Mds EUR d’obligations durables sous gestion, Ostrum figure parmi les plus importants investisseurs à impact en Europe. Nous avons une équipe dédiée de trois analystes extra-financiers qui travaillent en étroite collaboration avec les analystes crédit et ceux de la Stratégie ESG. Nous utilisons une méthodologie propriétaire de notations des obligations durables reposant sur des grilles spécifiques à chaque classe d’obligations durables. Enfin, nous avons un outil informatique dédié.