Alors que la Chine célèbre la nouvelle année du Lapin, les investisseurs scrutent le moindre indicateur pouvant jauger l’état de la reprise chinoise.
Rebond de la consommation post-pandémie, mais pas encore de normalisation…
Les premières données publiées indiquent un rebond de la consommation et de la mobilité lors des festivités du Nouvel An Lunaire.
Les revenus du tourisme domestique ont augmenté de 30 % GA et ont atteint 73 % de leur niveau de 2019. Le volume dans les transports publics a augmenté de 71 % GA, soit 54 % du niveau de 2019. Les revenus des salles de cinéma ont augmenté de 12 % GA, supérieurs de 13 % à leur niveau de 2019.
Les ventes de maisons neuves ont baissé de 14 % GA durant les festivités du Nouvel an, soit à 68 % de leur niveau de 2019.
Bien que les signes sur la consommation chinoise soient encourageants, ils sont encore loin de la normalisation, notamment pour le secteur immobilier.
… Notamment pour le secteur de l’immobilier
L’immobilier et les secteurs connexes ne représentent plus que 13 % du PIB chinois en 2022, alors qu’ils représentaient 30 % du PIB.
Les autorités chinoises ont soutenu l’investissement en infrastructure pour compenser la contraction du secteur. En 2022, celui-ci a été robuste à 9 %, alors que l’investissement immobilier était en contraction de 10 %. Cela n’a pas suffi à redémarrer la croissance chinoise qui a enregistré son plus faible taux de croissance annuel à 3 % en 2022, pénalisée par l’idéologie Zéro-Covid.
La dégradation du secteur de l’immobilier avait commencé en 2016, lors de la campagne de désendettement, afin de lutter contre la finance de l’ombre. Le but était de réduire les financements opaques du secteur qui pourraient menacer la stabilité financière et bancaire du pays.
En 2022, la pression s’était accentuée sur le secteur, dans le cadre du nouveau paradigme de « Prospérité commune », afin de lutter contre la spéculation qui faisait fortement augmenter les prix. La capacité financière des promoteurs immobiliers a été mise sous pression, provoquant la faillite d’Evergrande, sans soutien financier de l’État. Le gouvernement chinois avait privilégié les acheteurs en demandant aux banques d’État de prendre le relais en finançant les projets, afin de remettre les clés aux acheteurs.
Il est important de noter que la politique Zéro-Covid a également contribué à exacerber la détérioration du secteur de l’immobilier, à l’image de l’indicateur du climat des affaires dans ce secteur qui a atteint un plus bas historique en décembre 2022.
Les ventes d’immobilier résidentiel ont baissé à 28 % GA en décembre, en raison des restrictions strictes de mobilité.
Les autorités chinoises ont multiplié les mesures de soutien au secteur.
Le gouvernement a rétropédalé sur la politique des « trois lignes rouges » qui consiste à fixer des cibles sur la dette, le capital et les actifs, afin de limiter l’endettement du secteur immobilier.
Sur la fin de l’année 2022, l’approche des autorités sur le secteur a changé, en aidant les développeurs à sécuriser des financements. Les 100 plus grands promoteurs immobiliers ont levé plus de 100 milliards de RMB de nouveaux prêts, de dette et actions dont la majorité est d’origine domestique.
Toutes ces mesures ont pour but de stabiliser les conditions de crédit pour le secteur et éviter des cascades de défauts.
Défi démographique et taux de chômage des jeunes élevé : deux principales raisons pour maintenir la pression sur l’immobilier
La forte contestation qui a permis de mettre fin à l’idéologie Zéro-Covid est toujours dans les esprits.
Les prix de l’immobilier restent élevés, dans un contexte où le taux de chômage des jeunes est sur des plus hauts historiques. C’est un terreau propice à de nouvelles contestations.
L’autre point important est le vieillissement rapide la population chinoise qui a baissé en 2022 pour la première fois depuis 1961 à 1,41174 milliard d’habitants.
Le nombre de nouveaux nés est en baisse à 9,56 millions contre 10,62 millions en 2019, soit le taux de natalité le plus bas depuis 1950 à 6,77 pour 1 000, à comparer à 10,41 pour 1 000 habitants en 2019.
Malgré les mesures d’assouplissement de la politique de natalité (les ménages ont désormais la possibilité d’avoir 3 enfants), les ménages chinois sont toujours réticents à agrandir leurs familles, à cause notamment de la hausse des prix de l’immobilier.
En effet, la demande de prêts hypothécaires reste atone, alors que le taux d’intérêt moyen reste sur des plus bas historiques.
Xi Jinping en est conscient et devrait maintenir la pression sur le secteur, tout en préservant la croissance. C’est un vrai challenge de politiques économiques.
Stratégie de marchés
Le marché de crédit « High Yield » chinois a enregistré un fort rebond depuis le début de l’année, en lien avec les mesures de soutien au secteur immobilier, comme le montre le graphique ci-dessous.
Cependant, ce sont notamment les promoteurs de bonne qualité de crédit qui ont enregistré les plus forts rebonds, alors que les promoteurs en défaut (Evergrande) peinent à rebondir (graphique suivant). Cela reflète le repricing des primes de risque sur le marché du crédit chinois, ce qui est plutôt positif .